Tag Archives: H.T.V.

Jardin de mille rêves

Entre ton pull et ta peau
Un jardin d’étamines
J’y passe une main nue
J’y demeure, clandestine
Je m’y délice

Sur les routes du Grandp1080386 Nord
Je t’ai épousé
Un poème passe
Sur le velours de tes lèvres
Je murmure
Mille phares jaillissent et m’offrent
Une esquisse d’aurore

Enroulée, pelotonnée dans le creux
De tes hanches
Je vagabonde sur ton corps
Et bien ce n’était pas rien
Ces territoires enflammés
Mes mains s’y sont brûlées
Regarde, mes paumes sont restées brunes
J’étais petite et frêle
Folle d’un amour terrestre
La porteuse de voix
Qui ne voit rien du ciel
Quand à tes yeux elle se réfère

Ombre du songe, miel
Fragrance des vastes plaines
Force du trait d’union et du lien éternel
Missive charnelle que je glisse
Dans l’entre deux des continents
Entre ta peau et ton regard
Dans cet espace que je compose
Et qui m’oppose au vaste monde
Dans cet écrin ou rien,
Non vraiment rien
Ne trouble l’agencement des fleurs
Que tu fais naître pour que je cueille
Un à un leurs pétales
Et que j’en fasse le lit secret
Du souffle qui se lève
Quand je chemine entre tes rêves.

H.T.V.

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Reflet jaune et blanc

Une tache de lumière sur la nappe
Du jaune et du blanc dans le reflet des verres
Un souffle passe dans nos cheveux
L’heure est tiède, l’air est opaque
La table est mise pour nos corps à nourrir
Les tapis volants sont rangés sous les sièges.

Les voix se dispersent au-delà du rayon doré de la bougie
Sourires dans les traces de nos mains
Une heure qui s’éteint pour d’autres en chemin.
Il flotte un souvenir d’encens, de mer et de carte postale.

Comme une nuée d’oiseaux nous nous levons
Nos pas sont lents et nos corps souples
Nous quittons la rivière et entrons dans la nuit
Nos ombres s’effacent sous son voile.

Vers nous-mêmes nous allons
Et la route nous parle
Par delà la lumière jaune et joyeuse
Vers nous-mêmes nous allons
Et la route nous mène
Dans l’azur de la nuit pleine et transparente.

H.T.V. Juillet 2013

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Ligne rouge et bleue

Il trace une ligne au couteau dans mon cœur
Il y place une goutte d’encre bleue
Il écrit ses rêves à même ma chair
Le ciel m’a pris par la main.P1050416

Puissance de l’instant qui jamais ne demeure
Qui creuse et sonde les espaces sous ma peau.
Exister à jamais dans ces traces éparpillées
Dans les lézardes dont il forme ses mots
Mots tendres, mots profonds, mots insondables
Mots bleus d’encre délavée aux larmes de l’histoire
Mots légers que contrarie la course du sang dans nos veines
Histoire à réécrire mille fois
Des mille rêves qu’il gravera sur mon corps.

Au creux des mots la béance des vies qui dérivent,
Dans l’air salin qui n’éteint pas les braises
Les vagues orageuses sous des ciels lourds
Le poids des jours sans fin qui ne racontent rien du monde.

H. T.-V.

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On avait le doré du couchant

On avait le doré du couchant
Les ombres lâches
Les lézards nichés dans les pierres
On avait nos songes
Délicats, vifs, gais
On avait nos mains jointesP1000586
Un cœur battant en leur creux
Passait la guerre et ses convois
On était loin
Enfouis dans les roches
Enfants cachés surpris par la nuit
Attendant le matin perdu dans les limbes.
On avait nos lèvres
Pressées sur un désir
Une parure pour le reste à venir
On avait nos vies
Sinueuses, fugaces
Mêlées à la caresse du petit jour
On avait l’horizon
Le pont rose des deux rives
Nous deux assis
Encerclés de miroirs profonds
Cherchant à leur surface
Qui de l’ombre de l’un enveloppait si bien l’autre.

H. T.-V., avril 2013

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Avec des fleurs

Je vais rentrer et il va m’offrir le nom d’une fleur. Elle sera luxuriante, comme une liane, ou aura des feuilles en étoile disposées lâchement autour d’une tige dressée. D’un vert bien foncé elle sera cette plante, et la fleur sera rouge-orangé, ou jaune, ou peut être violet-foncé, en tous cas elle aura des pétales en éperon, agencés symétriquement. On pourrait se demander si elle est bien vivante, ou échappée d’une peinture réaliste.
J’aurais ce nom, en latin s’il vous plait, et les images surgiront, comme dans un film au ralenti. Une forêt, une mare, une prairie, encore des broussailles, puis une herbe clairsemée laissant apparaître un substrat sableux, puis de simples traces de végétaux, des algues (toujours des végétaux ?), et enfin la mer, qui aura tout effacé. C’est un chemin que je connais bien, que je refais mille fois, et le violet de la fleur se délave dans l’eau grise.

Il m’a apporté le nom d’une fleur, que je me suis empressée de jeter à la mer. Radeau minuscule errant sur l’écume.

Il m’attendait caché derrière une fleur. Elle était énorme.
Les couverts étaient en ordre de chaque côté des assiettes, on se tenait droit, les plats étaient bien garnis. On leur sacrifiait les rêves des enfants. Vingt ans plus tard les pas dans la rue au courant d’air glacial ne sont pas très assurés. Car le moindre brin d’herbe est empoisonné et marcher pieds nus nous est désormais interdit. Les talons hauts claquent et trahissent notre présence.

Il m’attendait avec du poison plein les mains. Par la fenêtre je pouvais voir des tours et des arbres, du ciel gris bleu et de vagues nuages comme immobiles. Moi-même je n’osais pas bouger. C’était l’époque où l’on écoutait son professeur, le temps des désirs dictés par les livres de savoir vivre et des photos figées dans leurs gaines noir et blanc.

Il disait « princesse » et des clairières aux fleurs sucrées s’ouvraient dans la forêt vierge. La mousse se faisait séductrice et attirante. La brume protégeait de l’agression du soleil. Je ne pensais rien, car troubler l’air par des questions ne se concevait pas. Dans la clairière les fées étaient partout. Elles essayaient de survivre aux croisades que la rationalité de mise leur livrait. Elles n’étaient pas très belles, rabougries et sur la défensive, et elles parlaient une langue perdue aux consonnes marquées. Elles m’envoyaient des messages codés que je ne savais déchiffrer mais que je faisais pourtant semblant de comprendre. Je hochais gravement la tête. Sûr qu’aujourd’hui ces avertissements, même correctement traduits, me resteraient encore inaccessibles.

Il m’imaginait éternelle et je l’ai été. Les fleurs ont poussé sous ma peau, d’abord discrètes, puis de plus en plus grosses. Au temps de la récolte leur parfum ne me quittait pas. Sur mes traces des mains avides en faisaient des bouquets qui ne survivaient pas aux premiers froids. Parcheminé, mon corps se faisait manuscrit. Les courbes des lettres anciennes retenaient mes boucles encore blondes. Quel chantier ! Fleurs et feuilles se décomposaient dans ce fatras organique, sans que ne pousse pour autant une vie neuve et fraiche.

Il m’attendait certes mais il s’est enfuit. De ce qu’il avait fait de moi il n’en a rien gardé. La boue colle à mes semelles et m’unit à la terre. A chaque pas je m’enfonce un peu plus. Loin de la serre qui nous abritait je me suis sentie dépérir. On ne nous apprenait pas à demander. Je ne savais retrouver mon chemin. Mes fleurs fanées à la main, assise sur le trottoir, je regardais passer les voitures. Elles étaient vides, tout comme mon cœur.

Il est resté au loin. Dans mon herbier tout est devenu poussière. Aujourd’hui les arbres sont vieux. Ils saluent leurs ancêtres sans conviction. La ville est recouverte de brume froide. La nuit tombe trop vite, j’avance trop lentement dans mes sandales bleu marine. Je ne serai pas au rendez-vous. Au seuil de nos dernières années, un incendie effacera tout, jusqu’au dernier traité de botanique. Enveloppée d’un drap de laine je contemplerai de ma terrasse le désert. Il sera le miroir de mon corps, tout comme lui lavé de ses empreintes par le vent de sable de la nuit. Alors rendue à ma virginité, je saurais attendre les moissons de sel qui stérilisent les sols. Transformée en tapis de cristaux blancs, la terre sera telle que je l’aurais rêvée, robe de mariée exposée au regard bleu du monde, étoffe brodée de fils délicats animée par l’air léger, souvenir complice discrètement relégué aux archives de ma mémoire.

Hélène Tallon-Vanerian, janvier 2013

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5 mars, la nuit : Et maintenant?

à Wlad
http://www.cosmoskolej.org

Et maintenant l’or de ton cœur
N’allumera plus les phares vagabonds
Une page de poésie en moins
A moi ses fragments
Une carte jaunie
Des mots étendus comme un drap blanc
Sur une terre non moins cristalline
Des mots gardés comme un trésor trop précieux
Pour des gestes désordonnés et pressés
Un temps lointain qui n’avait pas de fin
Qui se désagrège comme du sable éparpillé
Gaspillé et livré aux vents froids
Dans cette ère nouvelle
Par trop encline aux courants d’air.
On voulait tes images superposées au monde
Pour marcher sur des ponts imaginaires
Remonter l’horloge des soleils
Endormir les tempêtes en comptant ses bateaux.
Les mots sont rangés
Ternes maintenant
Les aiguillages font grève
Le voyageur a posé sa valise
Il distribue les breloques qui en coloraient les lanières
Mais les passants sont rares
Seul le chien aux beaux yeux clairs regarde de près la scène.

Hélène Tallon-Vanerian, mars 2013

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Maya

Automne au château
Perdue
Presque
– mais là bien vivante
Dans le cœur plus qu’un chant
Un appel et ton rire
Un peu de poussière sur ton jean
Passage sur des pistes lointaines
Horizon
Décor sur ton corps
Saison des murmures
Secret des aurores.

Rappelle-toi,
La forêt nous parle et nous protège.
Ici bas germe un arbre
Pour Titania
Chef de chœur toute puissante
Gardienne de nos étés
Égarée comme toujours
Comme ton amour qui ne veut pas,
Qui ne sait pas,
Qui joue pourtant si bien
Que les fées se réveillent.

Avec elles suivons la trace blanche
Du géant au dos nu,
Si beau
Qu’on n’ose pas
Saisir sa main tendue.

H. T.-V., Cévennes, octobre 2012

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